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SOO BAHK DO - Moo Duk Kwan










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 Bienvenue sur le blog Shiwol do-jang !


Shiwol do-jang est un espace mental construit en France à partir de la pratique de l'art martial Soo Bahk Do -Moo Duk Kwan. 
Le Soo Bahk Do est un art martial coréen, façonné par la culture et la tradition coréennes. Si certaines de ses techniques remontent à plusieurs centaines d'années, l'art dans sa forme moderne naît en 1945. La Corée recouvre tout juste sa liberté après 30 ans d'occupation japonaise lorsque Hwang Kee fonde son école Moo Duk Kwan à Séoul, d'où est issu le Soo Bahk Do.

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La pratique du Soo Bahk Do repose sur les principes de respect du vivant ("hwal" en coréen) et d'harmonie nécessaire entre l'humain et la nature. Sont également considérées comme fondamentales la cohésion du groupe et la solidarité. Enfin, comme le veut l'empreinte confucéenne, la relation entre l'enseignant et l'élève étudiant est considérée comme étant de la plus haute valeur. On trouvera aussi toutes sortes de textes, réflexions, digressions comme autant de petites sentiers cheminant dans l'art martial et au-delà.

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Articles RÉCents

22 août 2014 5 22 /08 /août /2014 16:39

Session photos le dernier jour avec les gradés et le Grand-Maître, lorsque les nuages ont bien voulu laisser un peu la place. "Il ne faut laisser jamais passer une opportunité", (ici, une percée des rayons après 5 jours de pluie et de brouillard) ; peut-être ne se représentera-telle pas.

 

 

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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 17:12

A la différence des arbres ou de leurs racines, le rhizome connecte un point quelconque avec un autre point quelconque, et chacun de ses traits ne renvoie pas nécessairement à des traits de même nature, il met en jeu des régimes de signes très différents et même des états de non-signes. Le rhizome ne se laisse ramener ni à l’Un ni au multiple. Il n’est pas l’Un qui devient deux, ni même qui deviendrait directement trois, quatre ou cinq, etc. il n’est pas un multiple qui dérive de l’Un, ni auquel l’Un s’ajouterait (n + 1). Il n’est pas fait d’unités, mais de dimensions, ou plutôt de directions mouvantes. Il n’a pas de commencement ni de fin, mais toujours un milieu, par lequel il pousse et déborde. Il constitue des multiplicités linéaires à n dimensions, sans sujet ni objet, étalables sur un plan de consistance, et dont l’Un est toujours soustrait (n - 1). Une telle multiplicité ne varie pas ses dimensions sans changer de nature en elle-même et se métamorphoser. A l’opposé d’une structure qui se définit par un ensemble de points et de positions, de rapports binaires entre ces points et de relations biunivoques entre ces positions, le rhizome n’est fait que de lignes : ligne de segmentarité, de stratification, comme dimensions, mais aussi ligne de fuite ou de déterritorialisation comme dimension maximale d’après laquelle, en la suivant, la multiplicité se métamorphose en changeant de nature. On ne confondra pas de telles lignes, ou linéaments, avec les lignées de type arborescent, qui sont seulement des liaisons localisables entre points et positions. A l’opposé de l’arbre, le rhizome n’est pas un objet de reproduction : ni reproduction externe comme l’arbre-image, ni reproduction interne comme la structure-arbre. Le rhizome est une antigénéalogie. C’est une mémoire courte, ou une antimémoire. Le rhizome procède par variations, expansion, conquête, capture, piqûre. A l’opposé du graphisme, du dessin ou de la photo, à l’opposé des calques, le rhizome se rapporte à une carte qui doit être produite, construite, toujours démontable, connectable, renversable, modifiable, à entrées et sorties multiples, avec ses lignes de fuite. Ce sont les calques qu’il faut reporter sur les cartes et non l’inverse. Contre les systèmes centrés (même polycentrés), à communication hiérarchique et liaisons préétablies, le rhizome est un système acentré, non hiérarchique et non signifiant, sans Général, sans mémoire organisatrice ou automate central, uniquement défini par une circulation d’états. Ce qui est en question dans le rhizome, c’est un rapport avec la sexualité, mais aussi avec l’animal, avec le végétal, avec le monde, avec la politique, avec le livre, avec les choses de la nature et de l’artifice, tout différent du rapport arborescent : toutes sortes de “devenirs”. Un plateau est toujours au milieu, ni début ni fin. Un rhizome est fait de plateaux.

 

(…) Ne jamais faire racine, ni en planter, bien que ce soit difficile de ne pas retomber dans ces vieux procédés. “Les choses qui me viennent à l’esprit se représentent à moi non par leur racine, mais par un point quelconque situé vers le milieu. Essayez donc de les retenir, essayez donc de retenir un brin d’herbe qui ne commence à croître qu’au milieu de la tige, et de vous tenir à lui” (Kafka, Journal). Pourquoi est-ce si difficile ? (...). Pas facile de percevoir les choses par le milieu, et non de haut en bas ou inversement, de gauche à droite ou inversement : essayez et vous verrez que tout change. Ce n’est pas facile de voir l’herbe dans les choses et les mots (Nietzsche disait de la même façon qu’un aphorisme devait être “ruminé”, et jamais un plateau n’est séparable des vaches qui le peuplent, et qui sont aussi les nuages du ciel).

 

Mille Plateaux, capitalisme et schizophrénie 2, Gilles Deleuze Felix Guattari

 

 

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7 juillet 2014 1 07 /07 /juillet /2014 15:06

De toutes les situations morales, les plus propices aux productions de l'art ou de la pensée, il n'en est pas de plus féconde que les grandes douleurs patriotiques. C'est qu'en effet, les différends suprêmes qui naissent entre les peuples si divers dans leurs aspirations et leurs tendances, créent chez les individus qui les composent des préoccupations d'un ordre très élevé.

Quand elles se résolvent par le sort des armes, c'est-à-dire par le risque de la mort, chacun de nous a dans une mesure quelconque fait un sacrifice utile à son élévation morale. Ces généreuses angoisses dépassent alors de bien haut, la zone étroite et confuse de nos préoccupations personnelles et dirigent nos sentiments vers une fin meilleure. Elles élèvent les coeurs, éclairent la conscience, stimulent la volonté, développent l'intelligence : les mots humanité, patrie, honneur, devoir reprennent pour chacun leur signification véritable. Elles font enfin que l'activité des esprits s'éloigne des faits particuliers pour s'élever vers des notions abstraites et plus générales.

Odilon Redon, 1872

 

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23 juin 2014 1 23 /06 /juin /2014 08:42

Il y a quelques jours, nous assistions avec une certaine émotion à la réunion de clôture du département d'Anthropologie de l'université Paris 8. Ce n'est certes pas là où nous fîmes nos études et pourtant, c'est là que nous en trouvâmes l'âme, l'énergie, et l'irrespect, qui nous paraît a posteriori indispensable à toute formation de l'esprit. 

Nous publions ici une des interventions, celle de l'ami DE Mendes Sargo, infatiguable militant, enseignant précieux et précis. Dans son texte, il y est notamment question d'une idée qui nous a souvent paru bizarre et qui trouve pourtant autour de nous ces temps-ci toute son actualité le désir d'étude. Désir à entendre au sens de Spinoza, celui du "conatus"  ou persévérance dans son être. Le conatus, ressource de toute puissance à être, et pour un certain nombre d'entre nous, la promesse de devoir "brûler ses meubles" pour pouvoir continuer à mener la vie qui vaille à nos propres yeux.  

Salut à toi, donc, qui es prêt à brûler tes meubles (ou l'as-tu déjà fait?) pour pouvoir être fidèle à toi-même, à ce que tu pressens qui te fera grandir, au-delà de toutes les petites vexations, de tous les combats quotidiens contre ceux qui voudraient contrôler ta vie et la limiter. Car il s'agit toujours et encore pour nous de :

Produire sans s'approprier, agir sans rien attendre, guider sans contraindre (Lao Tseu)

 

 

Toast pour la fin du département d'Anthropologie

(DEMS – 12 juin 2014)

Il y a quelque chose de déraisonnable et d'assez impoli à vouloir vivre toujours : c'est ce que me disait mon collègue Félix Corona, mort il y a bientôt deux ans, à la mémoire de qui je veux d'abord adresser ce toast.

Et voilà le département d'Anthropologie, fermant ses portes, venu à son ultime libation : j'essaierai d'être bref* et point trop verbeux pour laisser du temps à qui voudrait aussi prendre la parole.

*

Esquissons un bref bilan

Si d'abord on me demande ce que nous avons voulu faire avec ce département, je répondrais pour simplifier et sans craindre de trop m'éloigner de ce que pourraient en penser mes collègues que nous avons essayé de mettre en œuvre deux principes, deux axiomes. Leur libellé n'est pas au goût du jour, c'est le moins qu'on puisse dire :

Il y a un seul monde des femmes et des hommes vivants.J'emprunte ce thème à Alain Badiou**, mais il me semble bien convenir aux anthropologues. C'est une façon de ne pas concéder le monde dit de la « mondialisation », qui est un monde pour les marchandises et les signes monétaires, et qui, en fait d'universalité, s'avère bien plutôt le monde de la séparation et de la guerre les murs, les grilles, les codes, les drones.

Tenir ce thème suppose ou implique aussi une prise de distance avec l'Occident et ses manières de voyager. Car « ce que d'abord vous nous montrez, voyages, c'est notre ordure lancée au visage de l'humanité. » (Tristes tropiques).

On a donc pratiqué les études et les recherches d'anthropologie (économique, politique, historique, religieuse, des techniques, des arts, audio-visuelle, etc.) comme l'étude modeste et patiente du jeu infini des identités et des différences, dans la présupposition d'un seul monde pour tous les sujets humains qu'on soit ici à l'université Paris 8, un verre à la main, ou derrière une barricade de pneus à Bangui, sur le Maïdan ou place Tahrir.

On se souviendra que cette présupposition d'universalité trouve son origine dans une certaine anthropologie marxiste qui naquit en France dans les années 60 et qui est à la fondation de ce département. Oui, le marxisme … je vous vends le poisson au prix où je l'ai acheté.

*

Deuxième axiome : il y a un désir d'études. Les objets d'un pareil désir sont extrêmement divers et fluctuants, mais ils qualifient au moins un sujet que j'appellerais : une jeunesse intellectuelle. Je ne désigne pas là une tranche d'âge, mais plutôt l’ensemble, en vérité très vaste, de celles et ceux pour qui une étude, un voyage, peuvent commencer. C'est, transposé à notre temps, ce qu'on a pu appeler à la fin du XVIIIe siècle le « public cultivé ».

Un désir, ça n'est pas une demande ; il s'édifie même à l'opposé d'une demande, et il ne se laisse pas satisfaire ou combler par une « offre », fût-elle une « offre pédagogique ». Un désir s'entretient, éventuellement s'interprète : il est la logique des êtres vivants-parlants, il n'y a pas lieu de le convertir en demande, ce qui est la logique des marchands ou l'argument de la canaille (JC Milner, Les noms indistincts).

Laissez-moi vous citer ce que j'écrivais aux trois conseils, le 4 octobre 2010 : « Le département d'Anthropologie a formé depuis 20 ans beaucoup d'étudiants. Certains sont aujourd'hui chercheurs ou en position de l'être. Pour la plupart, quelles que soient leurs occupations actuelles, ces études ont joué un grand rôle dans leur vie intellectuelle et professionnelle. Dans notre Université, il a contribué aussi à la formation d'un grand nombre d'étudiants de diverses disciplines, (géographie, philosophie, sciences politiques, histoire, sociologie, sciences de l'éducation, psychologie, et même informatique et musicologie ou théâtre, etc.) qui y ont trouvé de quoi s'initier et se développer dans une atmosphère que beaucoup leur enviait. Il y a toujours eu un public qui n'a jamais décru, tant il est vrai qu'une jeunesse intellectuelle, qui existe bien plus qu'on ne voudrait ou oserait le penser, entend encore pouvoir concilier son désir d'études et une expérience du monde à l'écart des sentiers battus et des conformismes ; une jeunesse qui n'est pas la cliente passive des savoirs et d'usages sociaux qui passent avec les modes et les instrumentalisations du temps ; une jeunesse qui à sa manière, est elle-même productrice de savoirs, comme cela était reçu, et même pratiqué, à la fondation de notre Université. Voici des raisons que j'ai toujours trouvées premières et principales. Renoncer ne fût-ce qu'à une partie de ce public est, à bien des égards, une grave décision. Elle pèsera évidemment sur les orientations générales de l'Université qu'on se prépare à débattre, et fixera aussi pour d'autres structures menacées la tonalité et la méthode de ce débat. »

Certains collègues semblent s'étonner de ce qui se passe aujourd'hui : je trouve que ça n'est pas faute d'avoir été prévenus.

*

A la conjonction de ces deux principes, nous avons donc formé une jeunesse de toutes les parties du monde. Nous avons traité sur le même plan du désir l'étudiant venu des banlieues (supposé inculte) comme celui venant de sa « prépa » et des beaux quartiers (supposé cultivé). Nous n'avons pas fait une université de petits-blancs, ayants-droit de la mondialisation et de l'Europe. Nous avons même tout mélangé, les références, les gens, les âges, les expériences. Nous avons parlé d'un ton égal aux chômeurs, aux sans-papiers, aux gueux et même aux petits bandits. Eux brûlaient leurs meubles pour étudier.

En aucun cas, en aucune manière, nous n'avons préjugé du public, ce qui est la pire insulte qu'on puisse lui faire. Ceux qui maudissent leur public ou ont peur de lui, ceux qui ne veulent ni ne peuvent lire Mme de La Fayette avec les gueux n'ont pas d'enseignement mais juste une carrière. Élitaire pour tous, voilà la maxime de Schiller et de Vilar.

J'ajouterais que nous avons un motif d'orgueil : c'est d'avoir réussi à transformer certains objets d'étude en sujets d'études, c'est-à-dire d'avoir fait en sorte que des anthropologues naissent parmi les « sauvages ». Vous me direz qu'il y a là une équivoque, que cela ressemblerait, en plus moderne, à une conversion chrétienne missionnaire. Soit ! Mais nous ne pouvions pas aller plus loin que notre époque, et tout le monde ne peut pas se flatter d'aller au bout des possibilités que lui offre son temps. Que le sauvage lui-même fasse ses recherches, que celles-ci ne passent pas inaperçues, qu'il y trouve sinon son salut, du moins ses lignes actuelles de fuite, et qu'il puisse, enfin, devenir « l'intellectuel organique » de son propre temps-espace, voilà un résultat qu'aucun mépris ne pourra nous enlever.

*

Tout cela se termine maintenant, et il y a lieu de se demander pourquoi et comment, de faire la critique et l'auto-critique des opérations, afin que d'autres que nous puissent en retenir de quoi envisager leur propre suite.

Deux ordres de raisons, externes et internes, qu'il faut mentionner :

Le premier ordre de raisons est à situer dans le retour au naturel de l'université française. On sait depuis Richelieu et l'exclusion des jansénistes de la Sorbonne, que la passion principale de l'universitaire français est d'obéir au Ministère avant que celui-ci ne fronce les sourcils. Un bon moyen est de comparer les traditions philosophiques classiques. Descartes, Pascal, Diderot, Rousseau, Comte, Bergson, Sartre : aucun philosophe de langue française qui se soit trouvé bien à l'université, ou que l'université ait bien traité. Voyez les allemands : ils sont en majorité des universitaires.

Il y a eu un moment d'exception à cette longue tradition, que d'autres ont appelé « l'exception structurale », issue sans doute des effets de la seconde guerre mondiale et du souvenir de la Résistance. Cette exception court du milieu des années 60 au milieu des années 90 (au plus tard, du plus ou du moins). Époque bizarre ou certains « AEI », appareils idéologiques d’État (Althusser), fonctionnaient au rebours de leur tâche, comme justement les « intellectuels organiques » de Gramsci.

Maintenant, sous le nom de modernité, excellence, etc., toutes les singularités comme le département d'Anthropologie, et bien d'autres, disparaissent sous les objurgations de la norme, les concours de conformisme, les discours marchands. Mais dans le monde marchand il y a des ordres de grandeur, et des styles qui ne trompent pas. Je suis convaincu qu'une singularité comme la nôtre aurait pu mieux survivre dans une université américaine qu'en France, où en fait de grand commerce on a plutôt affaire à un cléricalisme mesquin qui sent son épicerie, son petit gain. L'empressement dans la servitude, pour la plus libre des fonctions publiques. Ce sera toujours un sujet d'étonnement.

La seconde raison, cette fois-ci externe et interne, « c'est une dure vérité que je vais te dire, Bellarmin », tient à l'accablant destin de ce qui fut l'université de Vincennes Vincennes ayant été l'un des noms de cette exception. Ce n'est plus aujourd'hui, et dans le meilleur des cas, qu'un mythe-alibi, une façon de nommer « nos valeurs » sans jamais se risquer à les exposer. Au vrai, je vois plutôt se développer chez de jeunes enseignants-chercheurs comme chez des anciens « brevetés » une haine sourde de Vincennes, comme raison secrète de la haine de soi, et, tout simplement, de la haine du peuple. L'université Paris 8 souffre plus qu'aucune autre et depuis longtemps d'un ultra-conformisme ; on y voit une façon spéciale de battre sa coulpe de tout ce qui rappelle les années rouges, ou rouges et noires, qui rend impossible que se prolonge en quelque manière, ni le département, ni son atmosphère, ni rien qui lui ressemble. Le ministère nous a mieux traités que cette université plongée dans la célébration honteuse de ce qu'elle a été. Guy Berger et Maurice Courtois publieront bientôt une histoire critique de Vincennes. Mais ce qui nous arrive avec sa fin ambivalente, mêlée de honte et de gloire n'est pas si nouveau : la haine de soi transfigurée en auto-satisfecit d'excellence c'est vieux comme Ignace de Loyola.

*

Pour détruire Carthage il a fallu y susciter un parti romain. Ainsi les anthropologues, déjà saisis par la guerre primitive, se sont divisés. Il y en a eu pour se plaindre de nos méchancetés d'autres de notre inculture. On n'a pas vu qu'aucun d'eux ait construit quelque chose de notable sous le nom d'anthropologie, je veux dire sur le plan collectif. La liste de nos crimes, j'y viendrai, aurait fondé l'argument de leur vertu. Eh bien je vous dirais que c'est la règle dès qu'on tient sa chasse plutôt que sa place ! Le cardinal de Retz écrit : « on a considérablement plus d'ennuis avec les amis de son parti qu'avec les ennemis du parti opposé ».

Soit. Il faut pourtant ouvrir le chapitre de l'auto-critique. Car nous avons commis, selon les points de vues, plus que des erreurs, des fautes, ou plus que des fautes, des erreurs. On pourrait par exemple demander au fondateur, Pierre-Philippe Rey, comment c'était possible, ayant été une poule, d'avoir pondu autant de poignards. Mais dans cet exercice, il faut toujours commencer par soi.

*

J'ai commis des crimes.

Je vous passe les péchés communs des enseignants : on sait depuis longtemps qu'il n'y a pas plus narcissique que Pygmalion ; on sait depuis Socrate que la pédagogie est un art pédophile ; on sait enfin qu'il y a bien de l'orgueil à prétendre corrompre une jeunesse qui ne nous a pas attendus.

Je veux des péchés « gros et gras » dit Luther à Mélanchthon. Les voici. Pour tous les items de cette liste, je n'ai jamais pris l'autorisation de Pierre-Philippe, et je tiens beaucoup à ce qu'on distingue mes crimes des siens :

Le scandale dit de « la Chouette », en hiver 98-99, je le revendique, même si je n'étais pas seul dans sa conception. C'était une révolte en règle contre une forme assez basse d'accaparation politique des études. C'était une révolution culturelle contre ceux qui m'avaient enseigné la révolution culturelle. Pour l'honneur de cette école, je l'ai menée avec précision, c'est-à-dire avec cruauté.

L'affaire des étudiants sans-papiers, l'occupation de l'amphithéâtre X à l'hiver et au printemps 2000. Moments difficiles, avec police, garde à vue, procès. Oui, j'ai jeté avec complaisance le département d'Anthropologie dans les bras des sans-papiers. Je militais pour le premier principe énoncé plus haut. Et puis je me croyais encore à Vincennes. A la vérité, les filles n'ont pas trop barguigné : il y eut même des mariages et des enfants.

L'occupation au printemps 2005 contre cette affligeante misère intellectuelle du « LMD », qui amputait un département comptant près de 700 personnes des deuxième et troisième cycles. Je militais pour le second principe énoncé plus haut. Dans cette affaire, je bats ma coulpe d'avoir été et cruel et complaisant.

Pour ces trois crimes je peux avoir sans rire des regrets, et même des remords, oui, j'y insiste. Mais pour le repentir, il faudra m'aider, car étant ce que nous étions alors, et l'université étant devenue ce qu'elle est aujourd'hui, le crime était de toute façon au même tarif que la vertu. A entendre tous les bons apôtres qui voudraient gouverner notre avenir pour notre bien et qui protestent de leurs bonnes intentions, il faut admettre avec Hegel « qu'il n'y a d'innocente que l'absence d'opération, c'est-à-dire l'être d'une pierre et pas même celui d'un enfant ».

*

Pour terminer cette confession si narcissique, j'avouerai un dernier crime, dont je suis mieux satisfait.

Sachant depuis 2011 qu'il n'y avait plus aucune chance de sauver le village ou les chemins, j'ai dû en hâter la destruction de peur que des fazendeiros en prennent possession tels quels, ou en faussent l'histoire et la géographie réelles. Les habiles voulaient dominer les postes des départs en retraite, et il fallait les leur donner sans les laisser s'emparer en plus des symboles. Il s'agissait que les esprits fins mangent leurs perles, pourvu qu'ils ne nous piétinent pas. Il fallait en outre rompre une fiction au plus vite, avant qu'il y ait trop de blessés, et trouver le point exact de la disparition. Peu m'importent les commentaires : la Bérézina est une victoire tactique. Depuis ma responsabilité, soit en plus de dix ans, je n'ai fait que diriger des retraites, et les critiques concéderont que c'est un art plus difficile que de diriger des attaques.

Je ne dirais pas aujourd'hui comment ça s'est fait, qui a dupé qui et comment. D'ailleurs on trouve toujours plus habile que soi, mais on peut être souvent la dupe de sa défiance, dit mon cardinal. Je peux au moins vous assurer, même si ça vous déplaît, qu'il y avait un esprit clair dans cet enfer tiède : l'ex-président Binczack. Ce n'est pas tout le monde, par ces temps de misère, qui accepte la reddition de Breda. Et vous offre les sauf-conduits d'usage.

Au bout du compte aurait-on pu faire mieux ? Sans doute. Je trouve, pour prendre exagérément les accents de Guy Debord (In girum imus nocte et consumimur igni), qu'il fallait disparaître. « Le particulier s'use en combattant », et l'usure aurait pu faire le miel de l'adversaire. Ce que nous n'avons pas pu réussir, il faut faire en sorte de le transmettre sans trop l’abîmer (E. Bloch, Le principe utopie).

Au XIIe Chant de l'Iliade, Sarpédon dit à Glaucos (Corona dit à Mendès) : « Ami, si échappant à cette guerre, nous devions toujours être exempts de la vieillesse et de la mort, je resterais moi-même en arrière … Mais mille morts sont incessamment suspendues sur nos têtes ; il ne nous est accordé ni de les éviter, ni de les fuir. Marchons donc ... »

Tralala.

*

Je ne saurais finir sans dire ce qu'on m'a interdit de dire, mais je ne suis plus à un délit près.

On ne peut tenir une décennie dans de pareilles conditions sans qu'il y ait quelqu'un pour vous apporter le pain, le sel et l'eau. Il ne s'agissait pas en l’occurrence de seulement conforter le soldat, mais aussi de lui prodiguer des conseils, et même de lui parler d'autre chose. Il fallait une figure pour supporter l'équilibre délicat entre la structure et le désordre, entre la continuité nécessaire et les ruptures rénovatrices.

De telle sorte que la véritable directrice de nos opérations et le secret de notre obstination, c'est bien Michèle Fédou, alias Maman, alias Michou : tant il est vrai que l'administratif joue un rôle crucial pour les études comme pour les recherches.

 

*   Tout ce qui a été écrit n'a pas été dit. Et tout ce qui a été dit n'a pas été écrit. On a tenté de faire une moyenne. Le discours, dans le genre épidictique, se pliait tout de même à quelques contraintes d’argumentation. Aussi a-t-on fait un peu plus long qu'il n'est raisonnable pour un toast.

** Conférence à Athènes, janvier 2014.


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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:36

Nuage noir dévalant le papier

Encre impatiente qui ramasse en elle

sables pierres cendres d'éruptions étreintes

 

Puisant aux forces telluriques

Soudain déferle la vague blanche

des mondes anciens puissante revanche

 

Eau noire débordée du canot

portant en elle d'inattendus diamants

Fracas de foudre de tonnerre de glace

Etes-vous les battements du renouveau

 

Cristaux bien nés du ciel et de la terre

Diamants de gloire et de frayeur

Présent à ce qui croît

Fardeau pour ce qui désespère.

 

 

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4 juin 2014 3 04 /06 /juin /2014 19:14

 

Apprendre, cela demande une ouverture, du constructible, du possible. Et qu'il n'y ait rien de prohibé ; a priori, on ne peut pas savoir à l'avance par quoi l'apprentissage passera. Que ce soit du côté de l'étudiant ou de l'enseignant (tant il est vrai qu'être enseignant est aussi être étudiant de ses étudiants).

On ne voit pas qu'un apprentissage puisse commencer par une fermeture, une assignation des places, des engagements restrictifs. Ou alors, seulement formellement, par convenance sociale, pour ne pas que l'enseignant doive passer la moitié de son cours à réclamer son bureau à l'étudiant qui s'y est assis. Sinon, cela veut dire d'avance que de l'apprentissage, on ne prendra pas le risque. Double bind, qu'elle soit de crabe ou de homard (Dieu est un homard, ou une double-pince, un double bind, dit-on dans Mille plateaux). Autant rester devant Youtube, à regarder le monde défiler devant soi.

 

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In Astérix en Corse

"Je n'aime pas qu'on parle à ma soeur.

- Mais elle ne m'intéresse pas votre soeur.

- Elle te plaît pas ma soeur ?!

- Mais si, bien sûr, elle me plaît ...

- Elle te plaît ma soeur !!? Retenez-moi ou je le tue.

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4 juin 2014 3 04 /06 /juin /2014 08:38

Ce lundi,

Nouvelle visite dans mon coin de jardin du camarade pianiste, plus exalté que jamais. Il s'approche, hésitant comme la fois dernière, ne voulant visiblement pas déranger. Sa question du jour (encore qu'il faudrait voir s'il s'agit d'une question, tant il semble plutôt demander si, sur un sujet donné, il y a matière à se poser une question). Il vient de voir un film, mais pas jusqu'au bout précise-t-il, même si le film était bon, où un personnage féminin mentionne 60 et quelques variations d'une même technique. Cela signifie pour lui que ces variations seraient toutes issues d'une même racine. Cette technique-racine, qui donnerait une arborescence de variations, fonctionnerait un peu comme les racines linguistiques. 

Il explique que ce sont les combats du film avec les différentes saisies enchainées à grande vitesse, dessinant ainsi l'arborescence, qui l'ont fait penser aux racines linguistiques.

J'essaie de comprendre ce qu'il y a à comprendre dans ce qu'il me dit. On peut considérer les formes comme un espace de conservation des techniques ; cela correspondrait à un lexique. L'enseignant ou le pratiquant devenu suffisamment autonome, aurait pour tâche d'actualiser* ce lexique en donnant son interprétation des termes qui constituent la forme. Pourquoi son interprétation ? Parce que la plupart du temps, une technique n'est pas immédiatement lisible ; elle demande un déchiffrage, une mise en situation en dehors de l'enchaînement.

Me vient également à l'esprit le fonctionnement de la langue écrite chinoise. Il y a des caractères de base, les clés, que l'on pourrait considérer comme les racines ; ces clés sont les éléments de base à partir de laquelle s'élabore la langue des idéogrammes. Peut-être l'idée de technique-racine du pianiste serait-elle liée à celle de langue composée? Le pianiste écoute, acquièce mais n' a pas l'air de vouloir prendre cette direction. 

 

La discussion continue à être débridée sous le soleil timide.

Outre le lexique, on peut considérer les formes sous leur aspect expressif. Toute technique, en tant qu'elle est un mouvement du corps, exprime quelque chose. Elle existe comme signifiant. Un enchaînement dès lors, n'est plus seulement un lexique mais, puisqu'il est une continuation de signifiants, il devient discours. 

Ce qui fait qu'on admire quelqu'un exécutant une forme, c'est qu'il/elle parvient à allier les deux dimensions : non seulement on voit le ciselé des techniques, le fait qu'elles sont des techniques de combat, mais en même temps, on perçoit le discours de la forme. Ou en tout cas, un des discours possibles portés par la forme. Ce qui induit une disparition, ou une discrétion de l'interprète derrière son discours.**

On voit bien ce qu'il peut y avoir de contradictoire, et donc de dynamique, entre les techniques de combat et le discours. On pense d'habitude, que quand on se bat, c'est qu'il n'est plus question de parler. Une des beautés des arts martiaux traditionels résident sans doute de ce délicat paradoxe.

 

 

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* actualité : une interprétation dépend du sujet qui la propose, de la situation dans laquelle il se trouve, et d'une synthèse complexe des éléments qui l'amènent à effectuer cette interprétation là à cet instant là.

** Le bon interprète n'est pas un virtuose, comme les musiciens dont le souci est plus de faire admirer leur habileté technique que de se mettre au service du discours du morceau (de la forme) qu'il joue.

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29 mai 2014 4 29 /05 /mai /2014 10:53

Samedi 24 mai, Shiwol organisait un stage de tui shou. 

 

Shou caractere chinois shou signifiant main autocollant-r320790b

Shou, la main, est le mot chinois pour le Soo coréen que l'on trouve dans "Soo Bahk Do" ; c'est aussi le 1er caractère chinois sur le drapeau de l'école Moo Duk Kwan.  

 A propos de mains, il nous fut expliqué par Maître Chen Yi-rhe le sens du salut chinois (utilisé également dans plusieurs styles coréens de sabre et d'Hapkido), avec un poing fermé recouvert par une main ouverte : salut à deux mains, dans lequel on trouve présente la dynamique yin/yang. Salut qui signifie que le poing, symbolisant la force des armes, doit être retenu par le fourreau, la main ouverte.  Intéressant sujet de méditation pour les élèves de l'école Moo Duk Kwan : qu'est-ce qui, dans notre école, fait office de fourreau pour ce poing jaune or, qui s'affiche sur le drapeau ? J'avancerai ici une hypothèse : c'est le caractère "Duk" material 139470986317562 400x300

 (de Moo Duk Kwan) c'est-à-dire la vertu, le fourreau comme retenue indispensable à tous ceux qui cultivent la force par l'entraînement. 

 

Tui

La poussée dont il est question s'avère être aussi bien un "tirer", le mouvement de base du tui shou étant circulaire. L'expérience toute simple mais instructive consistait dans le fait que le mouvement de pousser et de tirer se situe dans une continuité spatiale et temporelle. Pas d'interruption entre le fait de pousser et de tirer. Cette nécessaire continuité dans l'exercice implique que le travail à deux se fasse réellement à deux. Ce que montre la posture de base du binôme de tui shou : vue du dessus, il figure le yin/yang.

 

Tsing

 Pour que les deux partenaires travaillent effectivement à deux, le contact des mains est le moyen de l'écoute mutuelle "tsing". Voici comment on décompose le caractère pour "écoute".

Ideo1 petit

On s'aperçoit que ce caractère est très proche du Duk coréen (De en chinois), le seul élément les différenciant étant le caractère de gauche "oreille" qui remplace celui de "jambe et pied" dans le caractère De*

Il nous reste à souhaiter que tous les élèves participant aient autant d'écoute de l'énergie de leur partenaire que de jambes pour cheminer sur la voie et s'y tenir bien campés.


 ChenTaiji 0071

 

Merci à Maître Chen Yi-rhe et à tous les participants !

 

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19 mai 2014 1 19 /05 /mai /2014 13:55

 

Parce que les élèves ont souvent du mal à trouver du relâchement,

Parce que ce relâchement est important pour que l'entraînement soit un plaisir

Parce qu'il est  essentiel pour une meilleure efficacité des techniques

Shin/Chuk

 

Parce que toutes les disciplines martiales n'insistent pas sur les mêmes aspects

Parce que les discours de ces disciplines sont parfois contradictoires

mais pas forcément

 

Parce que les arts martiaux sont souvent accompagnés d'une propagande nationale ou nationaliste

Et que cette idéologie nationaliste à chaque fois qu'elle s'exprime 

abîme l'art, affaiblissent les idées les plus belles portées par ces "arts martiaux"

Et parce que nous prenons l'existence des nations comme un moment de l'histoire

sans plus

 

Et parce que nous aimons cette vieille idée humaniste, formulée par Pascal

qui est aussi celle de l'éucation populaire

qu'il est "bien plus beau de savoir quelque chose de tout que tout d'une chose"

 

Pour ces raisons et bien d'autres encore,

Shiwol do-jang organise un

 

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 Informations et inscription à l'adresse :

shiwolsoobahkdo@gmail.com

avant le 23 mai

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12 mai 2014 1 12 /05 /mai /2014 13:25

 

Par un perpétuel pied de nez du réel,

c'était quand ils ne se comprenaient pas

qu'ils se comprenaient le mieux.

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